A quoi ressemblera la nouvelle appli CPF ?

Appli CPF

Pour 2019, le cas du CPF (Compte Personnel de Formation) semble réglé. Les OPCO, désormais Opérateurs de Compétences, successeurs des OPCA ont pris la main et financent les dossiers. Enfin, en ce début Mars 2019, ils commencent à financer les dossiers...

En 2020, la nouvelle appli CPF

Pour ce qui est de l'année prochaine, la donne change, et la Caisse des Dépots et Consignations (CDC) est à la manoeuvre pour mettre en place la nouvelle appli CPF promise par le gouvernement. Lors d'une table ronde organisée au Centre Inffo, la grandes lignes de la nouvelle appli CPF ont été présentées aux organismes de formation :

  • Référencement d'une offre de qualité. Quelles formations proposer au public dans la nouvelle appli ? Il semblerait que les critères qualité formels (datadock, certification qualité) soient les seuls qui seront pris en compte.
     Appli CPF - Critères qualité
    Les offres seront par ailleurs présentées de façon aléatoire afin de ne pas privilégier tel ou tel organisme... Mais le risque d'engorgement est évident sur des thèmes comme l'anglais, pour lesquels beaucoup d'opérateurs virtuels (sur internet) se bousculent au portillon. On risque donc, lorsqu'on cherchera "cours d'anglais" à Toulouse, Marseille ou Nice d'être submergé sous des centaines, voire des milliers d'offres qu'il sera difficile de départager sur un simple écran de smartphone.

    Les Organismes de formation auront probablement intérêt à continuer à se battre commercialement en dehors de l'appli CPF ... et par des moyens plus traditionnels (pignon sur rue, internet, ...).
     
    En attendant, la Caisse des Dépôts et Consignations invite les organismes de formation à participer à la phase test de cette fonctionnalité en s'inscrivant ici : https://www.caissedesdepots.fr/of.moncompteformation
     
  • Autonomie des bénéficiaires. Ceux-ci devraient disposer d'un véritable tableau de bord, comme ils l'ont actuellement sur internet (https://www.moncompteactivite.gouv.fr/cpa-public/) afin de pouvoir gérer leur compte CPF. Et la CDC affirme qu'ils devraient être autonomes dans leur choix des formation. Oui mais autonome jusqu'où ?
    • Choix de l'organisme ?
    • Choix de l'organisme et de la formule ?
    • Choix de l'organisme, de la formule et de la date de session ?
    • Validation des informations de réalisation (formation faite, pas faite, partiellement faite, etc.) ?
    • Instructions de paiement de l'organisme ?
       
  • Paiement des organismes. C'est sans surprise le point le plus délicat. On attend donc avec impatience les règles qui seront mises au point sur ce thème...
    • Faut-il compter sur les stagiaires pour clore leurs actions de formation ? Probablement pas, l'expérience montre que les stagiaires se démobilisent dès l'action terminée. Peut-on les obliger à fournir tous les renseignements attendus d'eux ? Improbable...
    • Faut-il compter sur les Organismes de Formation pour clore les actions de formation ? Certes ils sont motivés pour le faire, mais est-ce que les pouvoirs publics sont disposés à leur faire confiance ? Improbable aussi ...
    • Une usine à gaz viendra-t-elle compenser l'absence de solutions simples ? On peut le craindre. Mais l'administratif a un coût. Et celui-ci sera invariablement repercuté sur le coût des formations...
       
  • Abondement par les employeurs et les financeurs. Ici aussi, la loi offre de nombreuses possibilités, mais que dire de l'appli CPF ? Comment s'assurer que l'argent parviendra sur les bons comptes ? Qu'il sera utilisé à bon escient ? Comment clôre l'action de formation, du point de vue des abondeurs... ?
     

Un beau potentiel de dérives

Deux cas de figure préoccupent particulièrement.

  • Les pseudo engagements... Quid du stagiaire qui s'enthouisiasme pour une formation et clique sur le bouton INSCRIPTION... Et puis la vie étant ce qu'elle est, il pense à autre chose, oublie de se désinscrire et ne se présente pas le premier jour. S'il paraît évident que la CDC ne voudra pas payer pour lui, il paraît tout aussi évident qu'il aura bloqué une place pour l'organisme de formation qui du coup ne la vendra pas un tiers...
     
  • La corruption... Qu'est-ce qui, dans le nouveau système, empêchera les stagiaires peu scrupuleux de passer des deals avec des OF... J'utilise mon CPF pour m'inscrire à ce stage... Je signe toutes les feuilles d'émargement... Vous m'inscrivez à tous les cours dans votre base de données... Et à la fin on fait moitié moitié ?

    La tentation de la corruption ne serait certes pas nouvelle... Mais s'il suffit de quelques clicks pour la mettre en oeuvre... ? Et quels seraient les recours des financeurs, si tout est en règle, tant du point de vue papiers qu'informatique ?

 

L'appli CPF 4 fois plus complexe que booking.com

On a souvent comparé l'appli CPF à des applications de réservation hôtellière comme www.booking.com. Oui mais... Booking.com organise les relations entre deux acteurs, l'hôtel et son client. La prestation est selon les cas payée à l'avance par le client, ou du moins garantie par sa carte bancaire. La réalité de la prestation (le séjour du client à l'hôtel) ne fait guère de doutes et la facturation n'a rien complexe.

Dans le cas de la formation professionnelle continue, l'Appli CPF va tenter d'organiser des relations entre de multiples acteurs :

  • Le stagiaire qui dispose d'un crédit sur son compte CPF.
  • L'organisme de formation qui vend une prestation qui sera entièrement, partiellement ou pas du tout réalisée.
  • Le CDC, censé payer ladite prestation.
  • Les employeurs et organismes financiers susceptibles d'abonder la dite prestation, et d'en exiger un compte rendu.

Par analogie à la loi de Brooke, on peut postuler que la complexité d'un projet augmente proportionnellement au carré du nombre d'acteurs ... Organiser les relations entre 4 types d'acteurs est donc 4 fois plus complexe qu'organiser les relations entre 2 types d'acteurs... Et les concepteurs de l'appli CPF devront se montrer 4 fois plus ingénieux que ceux de Booking.com s'ils veulent éviter une usine à gaz 4 fois plus complexe...

 

Alerte à la complexité donc !

Les risques sont évidents. Car si la nouvelle appli CPF ...

  • rend le fonctionnement des organismes de formation plus complexe...
     
  • retarde les validations de stages...
     
  • ouvre la voie à des dérives...
     
  • augmente les délais de paiement des formations, déjà très longs...

Alors ce serait l'échec inévitable pour la politique formation futuriste de Muriel Penicaud.

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